Hier, j’ai pris la décision de m’engager à faire un exercice : une heure par jour dédiée à ma créativité.
J’ai eu envie de tenter de renouer avec l’écriture et d’établir une constance avec elle, comme j’ai réussi à le faire avec l’entraînement depuis le début de l’année. Qu’on bâtisse une relation forte, stable et fidèle, elle et moi. (En ce moment, ma relation avec l’écriture pourrait plutôt se comparer à une ex-date qui te booty call trois fois par année. Pas fiable, un peu meh, pas vraiment satisfaisant...) Bref, j’ai envie d’une relation à long terme. De quelque chose de durable, de fidèle et solide qui évoluera en beauté avec le temps. Une heure d’engagement par jour, donc. Sans sujet précis, sans thématique. Juste moi, mes idées et mes mots.
Je prends la peine d’employer le mot “décision”, parce que je réalise que tout dans la vie découle d’une décision. Décider d’aller à gauche ou à droite. Parler ou se taire. Partir ou rester. Aller vers soi ou s’en éloigner.
J’ai longtemps pensé que ce n’était pas entièrement moi qui pilotait ma vie. Que j’étais à la merci des projets des autres, de ma génétique, de mes circonstances, de l’univers, de ses surprises et de ses opportunités (ou absence d’opportunités). Que j’en étais la victime ou la marionnette un peu passive. Je commence à peine à réaliser que c’est vraiment moi qui pilote. Ou qui doit décider de piloter, plutôt. Je crée ma vie, totalement et entièrement. J’en suis responsable. J’ai le loisir de choisir où j’ai envie d’aller. Ce que j’ai envie de vivre et d’expérimenter. Les créations que j’ai envie de voir dans le monde.
Parce que j’ai envie d’une vie créative, je m’engage donc à ma créativité à raison d’une heure par jour, au minimum trois fois par semaine. Un objectif clair et réaliste. Dans ma vision de début d’année, j’avais écrit “Avoir une pratique créative / artistique constante”. (Dans ma liste d’objectifs de vie, il y a “écrire un livre”, qui traîne là depuis mon adolescence…). Il reste 3 mois à l’année, et je réalise bien qu’elle n’apparaîtra pas par magie, cette pratique créative constante, si je ne choisis pas de m’engager avec elle.
Je débute donc aujourd’hui une relation (long terme je l’espère) avec mon cahier et mes crayons et je m’engage à honorer ce qui vit en moi en ce moment précis, et qui pourrait (voudrait?) être exprimé. Pour quelqu’un d’autre, ça pourrait être une heure par jour à renouer avec un instrument, à jouer avec ses pinceaux et ses couleurs, à ressortir son vieil appareil-photo. (Je vous encourage d’ailleurs fortement à vous engager à votre créativité, si vous en sentez l’appel aussi. Le monde a besoin de ce que vous avez à partager).
La vérité, c’est que je suis fascinée par le processus créatif. Par cette vision que j’ai parfois du monde dans lequel on pourrait vivre si chaque humain ici était totalement dévoué à sa propre créativité unique, sans barrière ni jugement, libéré de toute contrainte ou obligation provenant de l’extérieur. Mais comme tout créatif (ou humain) qui se respecte, c’est souvent beaucoup plus facile d’encourager les autres à créer et à partager leur art ou leurs idées que de le faire soi-même. L’histoire de ma vie, quoi. Percevoir clairement et instantanément le potentiel incroyable chez les autres et tenter de les élever et les amener à déployer leur magnifique essence.
En délaissant un peu la mienne au passage.
C’est peut-être l’éclipse d’aujourd’hui dans mon ascendant de la Balance qui fait son oeuvre, mais j’ai envie de m’engager envers moi, pour une fois. Envers mes talents et mes idées, et les reconnaître comme tels, comme je le fais si naturellement pour les autres.
Où se trouvent les idées et les créations, avant qu’elles ne soient saisies par un humain qui aura pris le temps de mettre sa vie occupée sur pause ce jour-là pour les capter et les matérialiser? Quelles sont les conditions idéales pour “recevoir” les créations les plus nécessaires pour l’évolution de l’humanité ? Où vont les idées et les inventions que personne ne prend le temps de capter et de concrétiser? Sont-elles alchimisées sous une autre forme, remâchées par un autre humain, avec sa signature unique? Qu’est-ce qui fait que certains arrivent facilement à s’engager envers leur créativité, alors que d’autres n’y parviennent jamais? Est-ce que ce sont les créations de ceux qui ont le plus de résistances à les partager qui sont en fait les plus nécessaires?
Je suis fascinée par ces questions et par l’impact qu’une création peut avoir sur nos vies. J’en ferai sûrement le sujet d’une série télé que j’aimerais produire un jour.
On se nourrit de storytelling depuis que le monde est monde. Que cherche-t-on autant à travers les films, les livres, la musique, les marques et les histoires des autres que l’on consomme chaque jour? Cherche-t-on une partie de soi qu’on aurait oubliée? Aspire-t-on à renouer, nous aussi, avec notre créateur intérieur? Ou bien est-ce qu’on consomme simplement pour se rappeler que nous ne sommes pas seuls? Pour voir se refléter des parties de nous dans les mots et les images des autres et pouvoir dire “j’existe, moi aussi” à travers ce personnage ou les lignes de cette chanson.
Peut-être l’art est-il simplement un chemin qui conduit vers le coeur. Qui sert à nous sortir peu à peu de notre tête. Peut-être est-ce pour cette raison précise qu’il nous fascine et nous émeut autant.
Nous sommes des millards à vivre ici sous cet énorme nuage d’idées et de potentiel créatif. Les inventions et les projets qui sauveront l’humanité se trouvent peut-être quelque part dans ce grand nuage de conscience intelligente qui plane juste au-dessus de nous et qu’on est trop occupés à remarquer. Suffit-il qu’un nombre suffisant d’entre nous prenne le temps de s’arrêter assez longtemps pour les recevoir et les mettre au monde?
Aujourd’hui est le jour un de ma tentative d’engagement envers ma créativité. Cette heure d’écriture aura abouti en l’initiative de démarrer ce Substack. Un premier petit pas vers moi, un premier petit saut dans l’inconnu. Sans plan, sans direction à court, moyen ou long terme. Autre que celui de m’asseoir, une heure chaque jour et oser articuler (et partager) ce qui m’habite.
Je termine en vous partageant l’extrait d’une entrevue de Rick Rubin, sur laquelle je suis retombée hier. Une pépite de sagesse sur l’art et la créativité, qui allait comme suit:
“The audience comes last. I’m not making it for them, I’m making it for me. And it turns out that when you make something truly for yourself, you’re doing the best thing you possibly can for the audience.”
Je crée cette page pour moi, d’abord. Si ça trouve écho en quelqu’un d’autre, merveilleux, ce sera mission plus qu’accomplie. Dans tous les cas, ça fait du bien de renouer avec soi. ✨